mardi 6 avril 2010

Joyeuses Pâques

La semaine dernière c'était Semaine Sainte en Colombie: Semana Santa.
A Popayán, ville blanche coloniale, pas de chocolats, mais des processions: à 20h le soir, de longues files solennelles ouvertes par la police en uniforme de gala qui tape sur des tambours; et l'enfilée silencieuse des faux prêtres en robe longue et ceinture large en soie avec un petit air du Klu Klux Klan. Ils portent sur des tréteaux une immense vierge pleurant son fils, suivie par des saints dont personne n'est plus bien sûr de ce qu'ils ont fait; suivie par un ange qui tient en laisse de métal la Mort avec sa faux, toute piteuse. Ca a l'air lourd, ils s'arrêtent tous les dix mètres et bloquent la ville sur des rues entières; vous avez intérêt à être du bon côté de la ville si vous voulez rentrer chez vous, parce que sinon vous êtes bon pour attendre que ces pieuses gens processent jusqu'à n'en plus vouloir.

Gabelo et Karol, les amis chez qui j'étais, louent leur balcon aux badauds qui ont la flemme de voir passer ça debout tous serrés dans la foule qui se tait. Ils habitent la maison même dans laquelle vivait Alexander von Humboldt, le scientifique allemand qui s'en est allé regarder les petites fleurs et les petits cailloux d'Amérique Latine pendant la grande expédition botanique de 1799 à 1804. Vieeeeeeeiiillle maison, où ils louent une chambre au parquet qui craque, et où ils ont installé le quartier général de leur vie d'artistes bohème à la Colombienne. C'est génial d'être avec eux; j'y retourne dès que je peux.

A Cali et Bogotá, et dans toutes les grandes villes colombiennes, on ferme toutes les boîtes, on vend le moins d'alcool possible, et on se fait celui qui va prier tous les jours. C'est Semana Santa, tout de même. Mais ça cache la tension sociale qui peut exploser sans prévenir, surtout qu'on s'approche des élections présidentielles en mai et qu'en ce moment, par exemple, il ne fait pas bon aller prendre l'air dans les régions où la guerrilla se balade. Preuve en est la première phrase d'une colonne d'opinion dans El Espectador, journal national, aujourd'hui:
"La Semaine Sainte est passée. Nous devons rendre grâce au Très-Haut parce que l'unique tragédie qu'il y eut fut la crucifixion et la mort de Jésus". Joyeuses Pâques!

2 commentaires:

  1. Coucou Marine, je regarde ton blog de temps en temps et ca me rappelle ma folle jeunesse de routarde il y a 30 ans. Bravo pour ton talent d'ecrivain, celui de photographe et bien sur bravo pour ton intrepidite !
    Florence

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  2. J'ai envie de retourner à Popayan après t'avoir lue! Il y a pas mal de choses à voir, notamment la maison de Valencia, un ancien président de Colombie (il le fut 4 fois!!) ou la Mosquera, résidence d'un autre président le général Tomas Cipriano de Mosquera. Il faut avoir fait la route vers Tierradentro ou San Agustin, passer tous les retenes militares par des routes abominables! J'y ai mangé un excellent sancocho de galina! La ville me fait penser à Santa Fe de Antioquia! Henri Flam

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