lundi 16 novembre 2009

Aguardiente, dulce tormento...

... ¿qué haces afuera? ¡Veni pa' entro!

Aguardiente, doux tourment... Que fais-tu en dehors? Viens donc par-dedans!

(NB: ma traduction rime. Et toc.)

Vous êtes ceinture orange de l'apprenti Colombien maintenant (je m'adresse à ceux qui ont suivi. Les autres, vous comprendrez quand vous serez grands :). Il est temps de vous initier à l'un des rites fondateurs de la colombianité, tiret-coeur-slash de la caleñité: tomar guaro, ou boire.

Mais pas n'importe comment, et pas n'importe quoi.
Tomar, littéralement, veut dire prendre. Mais ici, "que veux-tu prendre" = "que veux-tu boire" *.
Guaro est le mot de jargon pour désigner l'aguardiente. Attention: il n'y a pas que ça comme alcool ici, bien entendu. Mais c'est LA BOISSON de référence, le moteur de la rumba, l'amour et l'obsession des salseros (les amateurs de salsa).

Ca se présente dans des petites bouteilles, parce que n°1 - ça se prend pur; n°2: Papá y Mamá alimentent le budget rumba du fiston, mais il faut pas trop en demander; n°3: elles sont quand même trognon ces ptites bouteilles.
Ceci dit, si vous arrivez à vous constituer un parche suffisamment grand, (le parche c'est le groupe de copains avec qui vous sortez. Pur patois colombien) là vous visez "Bébé": c'est le petit nom affectueux qu'on donne à la grande bouteille d'aguardiente, celle qui doit vous durer toute la nuit.

Attendez, attendez... je vois bien que êtes pressé de goûter, mais faisons cela dans les formes. Pour ouvrir la bouteille, pas de règles spécifiques, celui qui l'a dans la main s'en charge. Voiiilà. Ensuite il nous faut des copitas: de toutes petites coupes, moins hautes que mon pouce. Oui, si on n'en a qu'en plastique ça marche aussi. Une par personne c'est mieux, mais de toute façon ça va tourner.
Prêtez l'oreille, mes agneaux: ici on ne sert pas les dames en premier. On sert les morts.
Et pliez, je vous prie, parce que les morts colombiens ont une certaine tendance à revenir quand ils ne sont pas contents, et à mettre le bazar dans la maison, et après j'ai des problèmes avec ma femme. C'est ce que chuchotent les anciens tout ridés, en tout cas, et des rides comme celles-là ça se respecte.

En conséquence, avant toute chose, versez avec déférence une gorgée d'aguardiente sur le sol, pour les morts. Maintenant seulement viennent les demoiselles, puis les caballeros.
Les coupes sont petites, mais on ne les remplit qu'à moitié; et puis on les fait passer.

En revanche on les vide complètement: l'aguardiente, c'est cul-sec. Celui qui pense perd.

Maintenant que vous êtes avisés, un toast. Vous pouvez vous référer à la formule d'entrée, elle est poétique mais elle plaît (je vous livre mon expérience, ici). Si vous voulez paraître plus relax et plus caleño, celle-là est classique, mais vous devez l'accompagner des gestes:
¡Pa'rriba, Pa'bajo, Pal'centro, Pa'entro! Par en haut, Par en bas, Par le centre, Par dedans!

Et hop! sans réfléchir.
Reste la dernière étape: pasar. Pour passer, directement après avoir vidé la coupe, on prend une gorgée d'eau, ou de jus, ou de ce qui vous plaira qui ait bon goût.

Parce que soyons bien clairs sur un point: ne vous imaginez surtout pas que l'aguardiente, c'est bon. C'est infect et c'est très fort. C'est pour ça qu'on est obligé de le passer avec autre chose tout de suite après.

Mais, d'une certaine manière, l'aguardiente ça va bien avec la salsa. D'une certaine manière, on finit par en avoir envie sur le coup des 11h, quand ces belles sortent de la salle de bain, éblouissantes, qu'on sort enfin pour que la rumba commence, que la salsa résonne plein pot et que les caballeros vous prennent par la taille en gigotant les jambes sur un pas très compliqué et en braillant en play-back: ¡CALI PACHANGUERO! **



* Direction le carnet de voc, que vous tenez avec application.
** Vous pouvez chanter aussi, si vous voulez me faire plaisir :)

1 commentaire:

  1. Hola Marine,

    Genial, ton résumé est très bon. J'avais jamais fait àttention à tous les choses à faire pour une fiesta avec de l'aguardiente.

    Bonne continuation. Jorge

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